25 decembre-1er janvier : A l'abri des arbres guatemalteques...

C'est à l'abri des arbres guatémaltèques que les derniers jours de 2008 s'habillent pour le passé. Ils sont sereins, n'ont rien à regretter, et savent profiter du présent.
La côte caraïbe est bien loin à présent, et nous goûtons de nouveau les joies d'un relief malicieux. Juste ce qu'il faut de montées et de descentes pour épouser les rondeurs de la terre. Nous nous perdons dans des vagues de vallons et des labyrinthes de palmiers et de cocotiers. La terre est belle. Et verte. Du vert pomme, du vert bouteille, du vert jaune, du vert d'eau. Nous respirons. Loin de la fournaise de Sonora, la pluie de cette fin d'année nous lave. Une bruine légère parfois, à peine une rosée ; une pluie plus lourde par moments, mais encore délicate ; une pluie agressive enfin, un mur d'eau. Elle enlève la sueur et les souffrances mexicaines. Elle nous prépare pour la suite, rince notre iris, nous offre un regard neuf.
Et pendant ce temps, les arcs-en-ciel se disputent, et le soleil a du mal à trouver le dernier mot.

C'est souvent entre les gouttes, avant que la nuit ne tombe, que nous cherchons un endroit pour planter la tente... Si les terres du Guatemala sont vierges, elles n'ont sont pas moins bien protégées. La moindre petite parcelle est emmaillotée de fils barbelés ! Nous hésitons à passer les barrières : les frémissements d'un foyer se font toujours entendre non loin de là... Nous aimerions pouvoir faire fi, et, pourquoi pas, camper au vu et au su de tout un village. Mais la prudence nous l'interdit. La civilité aussi. Alors il nous faut demander aux "casitas" environnantes... Et c'est sans doute là l'une des lourdeurs de notre vie de nomades. Evidemment, c'est l'occasion pour nous d'aller à la rencontre des habitants, mais c'est aussi beaucoup d'énergie et d'appréhension. Car il faut compter avec l'un des paramètres incontournables de notre voyage : la fatigue. Physique et nerveuse. Après avoir pédalé cinq ou six heures dans notre journée, nous n'aspirons qu'à une chose : nous poser. Prendre du temps pour le silence, pour lire, écrire. Echanger nos impressions aussi. Il est alors difficile de se rendre disponibles à la rencontre, de répondre aux mêmes questions, de parler une autre langue. Et cette fatigue nous frustre. Car on voudrait pouvoir la vivre à 100% cette rencontre, portés par le seul enthousiasme du partage. On voudrait avoir toujours un regard neuf, qui ne soit pas obturé par des paupières lourdes !
Aller vers l'autre, c'est pourtant saisir la chance de recevoir un accueil improvisé et gratuit, au sens le plus noble du terme. La Gratuité. L'un des plus grands trésors de notre humanité. Donner sans attente, pour la joie du geste. Il est saisissant de voir le sourire des personnes qui nous aident. Elles ne nous reverront jamais, mais elles sont heureuses. Elles lisent notre gratitude dans nos yeux. Elles se souviendront de nous comme la parenthèse d'un soir. Nous nous souviendrons d'elles comme des passeurs de trésors.
C'est ainsi que nous dormons dans le "cuarto" du ranch d'Aparicio, partageons le repas de la famille de Mirna, mangeons les noix de coco et les bananes d'un petit vieux au nom imprononçable. C'est ainsi qu'un enfant vient timidement nous offrir deux fruits, avant de repartir en courant. C'est ainsi que deux jeunes en scooter s'arrêtent près de nous pour nous donner deux sodas frais. Pour la joie du geste.
Les derniers jours de 2008 s'habillent pour le passé. Nous nous apprêtons à passer l'année nouvelle, nos trésors en poche et la gratuité en étrennes.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

superbe texte. Bravo pour l'écriture, le message et ce partage. Bises à tous deux

Anonyme a dit…

pffff, sara m'a grillée, je m'apprêtais à écrire "très joli texte", grrrrr !!!
bon, tant pis, je le dis quand même haut et fort : TRES JOLI TEXTE !! et vive la gratuité !
mama

Anonyme a dit…

ppffff, j'en reviens toujours pas de m'être fait griller par Sara !!!